justineBonjour,
Je n’ai pas l’habitude d’intervenir sur internet, mais votre site, vos conseils et les témoignages des autres femmes m’ont beaucoup aidée et rassurée, je voulait donc, moi aussi, partager mon expérience, et peut-être, être utile à d’autres femmes.

J’ai accouché en juin 2014, par césarienne en urgence, d’un petit garçon, Isaac.
J’avais toujours dit que je ne voulais pas allaiter, que cela me paraissait aliénant. Je le disais depuis si longtemps et avec tellement de conviction, qu’aujourd’hui, mes amies, mon compagnon et ma sÅ“ur s’en donnent à cÅ“ur joie dans les moqueries (gentilles), car cela fait plus de 14 mois que Isaac est allaité et ceci exclusivement.
Je ne voulais pas allaiter donc. Et J’ai allaité finalement. D’abord pour voir. Puis parce que cela se passait si bien. Jour, nuit, à la demande. Et avec beaucoup de plaisir. Retardant de semaines en semaines l’introduction des biberons de préparation pour nourrissons qui devaient rendre cet allaitement « mixte »… Ces biberons ne sont jamais venu.
Et je répétais: « En tout cas, le tire-lait: JAMAIS!!! »

Deux mois après la naissance de Isaac, ma sÅ“ur a, elle aussi, mis au monde un petit garçon, Soan. Elle l’a allaité aussi, exclusivement. Moins grande gueule que moi, moins catégorique, elle avait toujours dit: « Si j’allaite, je tirerai mon lait pour pouvoir sortir ». Elle loue donc un tire-lait. Et donc, je décide d’en louer un, moi aussi , pour essayer. D’autant que la date de reprise du travail se rapprochait à grande vitesse et que je me voyais de moins en moins commencer à donner du lait artificiel à Isaac…

Je reçois mon tire-lait ( un Mamivac Sensitiv à double tirage) quelques semaines avant la reprise du travail. Je tente quelques tirages (en simple tirage), la récolte est maigre. Il faut dire qu’Isaac était un « téteur » de compet et qu’il buvait tout. A coup de 30 ml et 40 ml, j’arrive tout de même à faire quelques réserves… Mais je vois la reprise du boulot se profiler sans savoir si oui ou non je pourrais fournir des quantités suffisantes… Bref !

N’ayant pas obtenu de place en crèche, nous optons pour une garde partagée à domicile avec des voisins. Je rencontre la nounou, lui parle de mon projet de continuer à donner mon lait à Isaac. Elle est OK (elle même a allaité sa fille), mais n’a jamais tiré son lait elle-même, ni donné des biberons de lait maternel aux bébés qu’elle a gardés. Les voisins, eux, sont OK, pour que je stocke des biberons de mon lait dans leur frigo, chaque matin, lorsque la garde s’effectue chez eux.

Reste deux inconnues :
1/ Est-ce que j’arriverai à fournir suffisamment de lait ?
2/ Isaac acceptera-t-il de boire ce lait au BIBERON ?

Parce que des biberons, bah il n’en avait jamais eu (enfin si, deux de quelques millilitres à la maternité, avant que j’ai ma « révélation » de mammifère)…

Quelques jours avant l’adaptation avec la nounou (bon juste deux jours avant, pour être tout à fait honnête…), mon compagnon tente de donner un biberon de mon lait à Isaac. On fait tout comme il faut (comme je l’ai lu sur ce site quoi) et c’est le drame. Isaac huuuuuuurle comme il n’a jamais hurlé (c’est un bébé qui ne pleure presque pas…), il repousse le biberon, détourne la tête, bref, gros gros échec…. Pas grave je me dis! C’est normal, ça va venir! Juste par acquis de conscience, je renifle le biberon (de lait frais tiré la veille), et là , MON DIEU, mon lait pue. Je savais que cela pouvait arriver, mais je n’avais même pas envisagé que cela pourrait m’arriver à moi (oui je sais, je suis pleine de certitudes qui s’effondrent les unes après les autres). Et ça pue grave ! Un truc entre le vomi, le savon et le parmesan. Tu m’étonnes qu’il n’en voulait pas !
Je panique un peu en me disant mais si mon lait pue, ça veut dire que tout le lait que j’ai stocké au congélateur pue aussi !!!! Je décongèle en vitesse quelques petits sachets, les renifle, encore et encore et ceux là , ne puent pas. Étrange….

Le lendemain, je décide de faire un nouvel essai. Ma sÅ“ur est à la maison, je prépare un biberon de lait décongelé. Il ne sent rien. Je laisse ma sÅ“ur avec Isaac, je m’éclipse dans une autre pièce et de nouveau c’est le drame. Isaac tète un peu puis s’étouffe, pleure, se détourne… Ma sÅ“ur essaye de lui donner du lait avec une pipette de Doliprane et il veut bien en boire un peu. On laisse tomber… Et à nouveau je renifle le lait. Il pue !!! Ma sÅ“ur me fait remarquer que les biberons en verre (Avent) peuvent parfois donner une odeur au lait. Bon, on va voir…(finalement, c’est sans doute le biberon en verre qui a fait « sentir » mon lait ». Avec les biberons en plastique cela ne s’est jamais reproduit).

Lundi, c’est le démarrage de l’adaptation avec la nounou. Je reste avec Isaac, mais le lendemain, il devra boire un biberon avec elle. Mardi, je le laisse avec un nouveau biberon en plastique (MAM). Mon lait ne sent rien, j’ai vérifié, reniflé et encore reniflé. J’ai tout expliqué à la nounou et surtout j’ai beaucoup insisté sur le fait que ce n’était pas grave si Isaac ne mangeait pas au début, que c’était normal et qu’en aucun cas je ne penserais que c’était de la faute de la nounou. Malgré tout, je ne la sens pas très à l’aise avec tout ça…Une heure plus tard, je reçois un appel paniqué de la nounou, me demandant de venir immédiatement. J’entend Isaac qui hurle derrière elle. J’arrive dans les 5 minutes suivantes et elle m’explique qu’Isaac s’est étouffé avec sa gorgée (ce qui veut dire qu’il a tout de même accepté de boire) et qu’elle a eu très peur parce qu’il s’est mis à crier très fort. Je la rassure et lui propose de finir de donner le lait à Isaac avec la pipette. Je les laisse. De retour une heure après, il semble que Isaac a accepté de boire un peu. La semaine d’adaptation passe ainsi. Chaque jour, La nounou propose le biberon à Isaac, qui tète un peu, puis se détourne et boit finalement un peu à la pipette. Bon. Il n’a pas l’air mal…

Au fil des jours, tout se stabilise. Isaac accepte de boire les biberons. Je lui en prépare alors 3 pour chaque journée de garde. Un petit de 60ml pour le matin (10h30), un « grand » de 120ml pour le déjeuner et un autre entre 60 et 90ml pour le goûter.

J’ai donc repris le travail et j’ai la chance de disposer d’un bureau personnel dont la porte peut fermer à clé. J’appose une petite affiche sur ma porte qui informe mes collègues que si elle est fermée c’est parce que je suis en train de tirer mon lait et que je serais de nouveau disponible dans quelques minutes.
Je tire alors deux fois par journée de travail. Une fois autour du déjeuner et une autre autour de 16h. Les quantités tirées sont assez aléatoires : les bons jours, je tire 140ml en double pompage à chaque tirage. Les mauvais , je tire 70ml… Je remarque rapidement que ma production dépend beaucoup de ma fatigue, du fait de boire suffisamment et de la température dans mon bureau. Lors d’une panne de chauffage en plein mois de décembre, je ne tire strictement rien : panne sèche.

Niveau logistique, j’ai adopté la technique du sac plastique « zippé ». J’emmène mes téterelles propres et assemblées dans un sac congélation hermétique. Après mon premier tirage, je transfère le lait dans des sachets spéciaux qui sont stockés dans le réfrigérateur de mon travail , et les téterelles sont rangées dans le sac congélation et mises elles aussi au frais en attendant le tirage de 16h. Puis nettoyage le soir à la maison.

Tout se passe bien. Avec la diversification d’Isaac autour de ses 5 mois, il s’intéresse de moins en moins aux biberons. Il tête toujours beaucoup le soir et la nuit (merci le co-dodo) mais, de plus en plus souvent, la nounou me rend des biberons quasi-pleins le soir… Je supprime donc le biberon du matin, puis celui du midi que je remplace par un yaourt bio nature. Je supprime donc un tirage lors de mes journée de travail.
Vers les 8 mois de Isaac, je supprime aussi le biberon du goûter remplacé lui aussi par un laitage.

Et tout se passe bien encore.

Aujourd’hui Isaac a 14 mois et il est toujours allaité. Le soir, la nuit (une ou deux tétées chaque nuit) et le matin. Son alimentation est totalement diversifiée. C’est un bébé magnifique.

A aucun moment je n’ai regretté de m’être finalement lancée dans cet allaitement « long ». Je ne l’avais pas prévu, pas documenté, pas anticipé. Les sites et blogs spécialisés, les témoignages de femmes allaitantes et les conseils de professionnel(les) formées à cette question que j’ai pu y trouver ont été déterminants dans mon parcours d’allaitement et dans sa réussite. Le fait d’avoir une sÅ“ur devenu mère et allaitant en même temps que moi a aussi été un soutien précieux. Encore aujourd’hui, je suis abasourdie de l’ignorance de beaucoup et des mensonges ou contre-vérités qui sont colportées au sujet de l’allaitement. L’absence de formation de la plupart des médecins est réellement incroyable.

Moi qui ne voulait pas allaiter car je trouvais cela incompatible avec mon féminisme, j’en ai finalement tiré une force tout fait féministement correcte ! Je trouve fascinant cette autonomie du corps des femmes à nourrir leurs enfants hors de tout circuit marchand. C’est une des rares choses non marchandisées que j’ai fait dans ma vie jusqu’à présent.

Et surtout, le plaisir manifeste de mon fils à téter , son épanouissement dans ce lien si particulier, ont été et sont encore une immense satisfaction pour moi.
Il a donc aujourd’hui 14 mois. Je ne sais pas quand il arrêtera de téter, ou quand moi, j’en aurais assez. Je ne ferme plus aucune porte. Je verrais bien ! Merci et bravo à toutes les femmes qui partagent leurs expériences et leurs compétences sur ce site ou dans des cadres différents. Il s’agit là d’une véritable solidarité féministe !

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