– Quel choix avez-vous fait au moment de la reprise du travail : sevrage ou poursuite de l’allaitement ? Pourquoi ?

Comme je reprenais le travail sur une période, où je reçois beaucoup de public dans mon bureau, et où je dois encadrer des intérimaires toute la journée, j’avais envisagé un sevrage « partiel », c’est-à-dire continuer à allaiter lorsque je suis avec mon enfant (y compris weekend et congés) et qu’il boive des biberons de lait infantile en journée lorsque je suis au travail. Je pensais que tirer mon lait au travail pour continuer un allaitement exclusif serait fastidieux.

J’ai changé d’avis par la suite.

 

– Comment vous êtes-vous organisée ?

J’avais lu sur internet qu’il faut habituer l’enfant et son propre corps plusieurs semaines à l’avance. Nous avons commencé à introduire un biberon 3 semaines avant pour arriver à trois biberons la veille de la reprise.

J’ai d’abord apporté mon tire-lait au bureau afin de me soulager le midi. J’ai la chance d’avoir un bureau individuel, qui ferme à clef et qui a des rideaux. Je pensais jeter ce lait mais finalement je l’ai conservé au frigo du bureau et mon fils a pu le boire le lendemain.

Du coup, j’ai décidé de continuer à tirer le midi quelques jours pour habituer son estomac petit à petit au lait industriel.

Les premiers jours, j’ai aussi utilisé des coupelles recueille-lait car j’avais beaucoup de lait qui s’écoulait au travail. Comme c’était désagréable, j’ai ensuite mis des coussinets absorbants. Au bout de 2 semaines, je n’en ai plus eu besoin.

Lorsque je retrouvais mon fils le soir, la tétée était longue (parfois plus d’une heure) mais j’avais moi aussi du mal à me décoller de lui (c’est encore un peu le cas).

Quatre semaines après, lors de mes premiers congés, on a repris l’allaitement exclusif au sein pendant 10 jours. Comme j’avais finalement continué à tirer mon lait le midi jusqu’à ces vacances, à la reprise je me suis dit que tirer deux fois au lieu d’une, ça ne changerait pas grand-chose. Nous entrions dans une période basse de réception du public, j’en ai profité pour annoncer à ma chef que j’allais tirer mon lait non plus sur ma pause du midi mais à 11h et à 14h30, ce qui correspondait aux deux repas de mon fils en mon absence. Le soir, je mettais au frigo les deux biberons pour que son Papa les lui donne le lendemain (il a la chance d’avoir un papa qui travaille à la maison et le garde avec lui toute la semaine). La veille des weekends, les biberons allaient au congélateur car ils n’étaient pas transportés en sac isotherme avec de la glace (30 min de trajet).

Je laisse mon tire-lait au bureau (Medela Symphony, trop lourd à transporter) et je ne lave mes téterelles que le soir à la maison. La journée, elles restent au frigo avec les biberons.

Depuis ses 5 mois, je ne tire plus qu’une fois par jour sur ma pause de midi. Bébé tête lorsque je suis à la maison (de 17h à 8h) et ne prend qu’un biberon de mon lait le midi. Je n’ai pas de stock mais nous avons une boite de lait en poudre dans le placard si un jour le lait se renverse où s’il arrive qu’il ait davantage faim. Pour l’instant, la boite n’a pas été ouverte. Il arrive que bébé manifeste sa faim une heure avant mon retour, son Papa le distrait alors par des câlins et des jeux et l’emmène en balade si cela ne suffit pas à le faire patienter.

– Quelles ont été vos principales difficultés ?

J’ai eu du mal à l’annoncer à mon travail. J’ai des scrupules à faire de telles pauses pendant que mes collègues travaillent. Pourtant beaucoup font des pauses cigarettes qui sont parfois longues. Mes pauses tire-lait n’ont pas été décomptées de mon temps de travail, ce qui prouve que ma patronne est compréhensive même si elle trouve que je me donne du mal pour rien (« Un biberon c’est aussi bien et ça les rend moins capricieux »).

Les premiers mois, il m’arrivait régulièrement d’être en retard pour une séance de tire-lait car je continue à accueillir du public sans toujours oser l’orienter vers des collègues. Et ma poitrine devient désagréable et presque douloureuse.

J’ai toujours la hantise d’oublier de me rhabiller au moment d’ouvrir la porte de mon bureau après une séance de tirage, ce qui me vaut de beaux cauchemars parfois (mais qui sont drôles). Je vérifie toujours plusieurs fois si j’ai bien fermé le verrou de ma porte pendant que je tire…

– Quels ont été vos meilleurs moments ?

Les meilleurs moments sont les tétées de retrouvailles et finalement toutes les tétées depuis que j’ai repris le travail. Je suis très fière de pouvoir nourrir encore mon enfant, que ce soit seulement mon lait qui le fasse grandir et qu’il apprécie autant ces moments lui aussi.

Il y a également les visites chez le pédiatre quand on nous dit « il grandit très bien, continuez comme vous faites ».

Mais aussi le fait de se balader sans prévoir une logistique pour ses repas. Et pouvoir répondre à son entourage qu’on a besoin de rien car je suis sa cuisine sur pattes ! Finalement l’allaitement est souvent vu comme contraignant alors que je trouve que ça rend plus libre dans les déplacements avec bébé.

Il arrive parfois que mon conjoint vienne déjeuner avec moi et je peux allaiter du coup mon fils le midi. Ce sont de belles pauses-déjeuner !

– Qu’est-ce que vous souhaiteriez dire aux mamans qui doivent faire un choix dans les semaines à venir ?

Il faut bien se renseigner, auprès de consultants en lactation ou de sites sérieux comme la Leache League, s’écouter et ne pas se mettre de pression : l’allaitement c’est un choix personnel, que peu comprennent (et on s’en fiche). On peut revenir en arrière comme je l’ai fait (refaire de l’exclusif). On a le droit aussi de ne plus allaiter. C’est une décision qui ne regarde que les parents et leur enfant.

Il y a beaucoup de femmes autour de moi à qui l’on a dit qu’elles n’avaient pas assez de lait et qui ont regretté de ne pas avoir allaité. Avec mon premier enfant, j’avais écouté une sage-femme de la maternité qui me conseillait de compléter les tétées par un biberon à chaque repas car, selon elle, je n’avais pas assez de lait pour un si gros bébé (4kg200 à la naissance). Si j’avais su, j’aurais refusé les compléments et j’aurais poursuivi l’allaitement plus qu’un petit mois.

Le soutien du conjoint me semble nécessaire. J’ai la chance d’avoir un conjoint qui m’a toujours soutenu dans les bons et les mauvais moments et qui me laisse l’entière liberté de continuer ou non d’allaiter.

– Ce serait à refaire, vous referiez le même choix ? Que changeriez-vous ?

Je ne commencerai pas si tôt l’introduction de biberon car cela me brisait le cœur de ne pas donner le sein à mon bébé alors que j’étais là.

Et j’aurais demandé le congé pathologique : j’étais épuisée lors des premières semaines et j’ai trouvé que j’avais repris le travail trop vite (il avait 2 mois et demi).

Je ne sais pas s’il aurait été préférable de tirer plus souvent mon lait au travail les premières semaines car je pense que cela m’aurait beaucoup stressée (et l’on aurait beaucoup toqué à ma porte).

Je ne changerais rien d’autre. Les premières semaines ont parfois été difficiles car j’avais l’impression de passer ma vie avec bébé au sein et c’était parfois douloureux. Mais je me suis accrochée car je me doutais que cela valait la peine. Aujourd’hui, nous apprécions tous les deux ce lien si fort. Je pensais continuer à tirer mon lait au travail au moins jusqu’à ses 6 mois, là je me vois bien partie pour 6 mois de plus et qui sait, peut-être davantage.

 

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